
ENTREVUE AVEC UN CHIEN
[Début de l’entrevue inédite]
ANAÏS MINE : Salut, le chien. Avant de répondre à mes questions, je te suggère de rentrer ta langue afin de ne pas la sectionner au moment de t’exprimer.
CHIEN : Aïe! …bonne idée. Je vais essayer d’y penser à l’avenir. Merci, chère amie.

CHIEN : Euh… Je ne vois pas ce qu’il y a de mal à obéir à son maître. Tu as bien un maître, toi aussi, non?
A.M. : Non, les chats sont trop nobles pour avoir un maître. À l’appartement où j’habite, j’ai à mon service un humain qui fait office de majordome. C’est lui qui, entre autres, change ma litière. Évidemment, en ce qui te concerne, l’exemple ne s’applique pas puisqu’en tant que chien, tu es trop bête pour faire tes besoins dans une litière…
CHIEN : Euh… j’aime mieux faire mes crottes quand je prends ma marche avec mon maître.
A.M. : Très chic! Et ton maître doit ramasser ça dans un sac de plastique. Décidément, les propriétaires de chien sont comme des préposés aux bénéficiaires. D’ailleurs, n’as-tu pas honte de te laisser traîner en laisse?
CHIEN : Ben… C’est le règlement municipal qui exige qu’on me promène en laisse…
A.M. : Le règlement, le règlement. J’ai toujours trouvé que les chiens avaient l’étroitesse d’esprit des militaires : il obéissent sans se poser de questions…
CHIEN : Je…Aïe! Maudite langue… Je trouve que tu as une mauvaise perception des chiens et je ne partage pas ton opinion, Anaïs!
A.M. : Écoute, très cher, je ne suis pas seule à dire ça. Tout le champ sémantique canin est péjoratif, ce n’est pas pour rien. Quand un être humain, par exemple, traite son semblable de chien, ce n’est certainement pas pour lui faire un compliment! D’ailleurs, il est prouvé que le chien est l’espèce la plus abâtardie du règne animal.
CHIEN : Abâtardie… comment ça?
A.M. : Regarde-toi l’air. Qui pourrait croire que ton lointain ancêtre était un loup? Tu n’as pas de queue, tu es frisé comme un mouton, et tes oreilles tombent lamentablement. Sans parler des autres races de mutants qui souffrent de dystrophies diverses ou qui ne peuvent même plus mettre bas sans l’intervention d’un vétérinaire…
CHIEN : Je… je ne voyais pas ça de cette façon-là. Mais tu as peut-être raison. Je me sauve à l’instant rétablir la dignité de mon lignage.
[Le chien descend de son siège]
A.M. : Où vas-tu comme ça?
CHIEN : Je m’en vais dans la forêt la plus proche m’y accoupler avec une louve! Ciao!
[Le chien quitte la pièce]
A.M. : Pauvre imbécile : tu es castré! Le con, il ne m’a pas entendue… Tant pis et bon débarras. Or donc, il semblerait que ce soit la fin de cette entrevue. À la prochaine occasion, je recevrai un sujet beaucoup plus savoureux. En effet, j’interviewerai une souris. Inutile de préciser que la rencontre sera très brève, ah, ah, ah, ah, ah.
[Fin de l’entrevue]
Michel